Le cinquième Recensement général des populations et de l’habitation (RGPH-5) a démarré le 23 octobre dernier et se poursuivra jusqu’au 12 novembre. Lancée par le Ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités territoriales Payadowa Boukpessi, l’opération revêt une importance cruciale pour notre pays, car elle devra permettre de disposer des indicateurs nécessaires au suivi et à l’évaluation des agendas nationaux. Face à un tel enjeu, l’organisation de la communication reste calamiteuse, faisant planer sur l’opération le risque d’un échec cuisant.
Lors du lancement du RGPH-5, Payadowa Boukpéssi a indiqué que “le gouvernement attache une importance capitale à la qualité des résultats de cette opération scientifique et d’envergure nationale. “. Il a lancé un appel citoyen à toute la population ” pour réserver un accueil chaleureux aux agents recenseurs qui mènent une mission de service public et à leur fournir les informations demandées qui concernent plusieurs aspects de leur vie. “. Pendant trois semaines, ce sont 14 500 agents recenseurs qui seront déployés sur l’ensemble du territoire et dans chacune des 117 communes que compte le pays.
Le but de l’opération est de mettre à jour les chiffres démographiques et socio-économiques, 12 ans après le dernier recensement général. Elle permettra de savoir combien de personnes vivent au Togo. Elle fournira également des informations sur les caractéristiques de la population : âge, profession, moyens de transport utilisés, conditions de logement… Ainsi, c’est grâce aux informations collectées que l’État togolais fera ses planifications pour l’amélioration de nos conditions de vie dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’emploi, de l’accès à l’eau et assainissement, etc.
Au plan technique, l’opération va permettre de disposer des indicateurs nécessaires au suivi et à l’évaluation des agendas nationaux tels que la feuille de route gouvernementale 2020-2025 et les agendas internationaux notamment les ODD, l’agenda 2063 de l’Union africaine, etc.
Elle permettra également de connaître la situation sociale de la population, y compris celle des populations vulnérables, notamment les personnes vivant avec un handicap, les orphelins, les personnes âgées et les femmes à des niveaux géographiquement désagrégés. De plus, le RGPH-5 va apporter des réponses aux questions de développement et de lutte contre la pauvreté telles que : dix ans après le RGPH-4, combien sommes-nous au Togo ? Où vivons-nous? Comment vivons-nous? Ainsi, le RGPH fournira un véritable vivier d’informations permettant de mieux orienter les politiques économiques et sociales, et aussi d’en assurer le suivi-évaluation.
Pour la planification du développement pour les dix prochaines années dans notre pays, c’est tout le monde qui gagne : le Gouvernement, les partenaires techniques et financiers, les communes, les acteurs de développement, le secteur privé, pour l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation des programme et plans de développement.
Autant dire que l’enjeu est de taille et la cause nationale. Le leadership du Chef de l’Etat et son engagement personnel sur l’ensemble du processus témoignent de cet enjeu. De même que l’enveloppe débloquée par l’UNFPA qui s’élèverait à 8 milliards FCFA selon nos informations.
Un début difficile à cause d’une communication déficiente
Si les efforts soutenus de Faure Gnassingbé et de son Gouvernement pour la réussite de l’opération sont constants, le constat en ce début de recensement est alarmant et sans appel : les populations se sentent peu concernées. Pire, certains se méfient des objectifs de l’opération lorsqu’ils ne défient tout simplement pas les agents. La faute à une communication déficiente, désastreuse.
Sa principale faiblesse est que la conception du plan de sa mise en œuvre n’a pas été suffisamment inclusive et se relève peu professionnel. Celui-ci a complètement ignoré la place centrale des médias traditionnels dans la pédagogie et la sensibilisation des populations, alors même que l’exemple tout récent de la crise de la Covid-19 est là pour nous édifier. Un plan professionnel et efficient aurait dû nécessairement allier des actions médias et hors médias, dans une démarche de massification et de diversification des messages.
Comment peut-on réussir à mobiliser les populations et à les faire adhérer à un tel sujet, en faisant recours avec seulement 5 ou 6 journaux écrits sur la cinquantaine paraissant régulièrement, 15 radios sur les 80 qui émettent de façon continue ou encore 10 médias en ligne sur la centaine qui existe ? Résultat, alors qu’il ne reste que 2 semaines sur le délai réparti, seuls un peu plus de deux millions de personnes sur les 8 millions d’habitants de notre pays ont été recensés.
En choisissant de n’allouer que 300 millions à la sensibilisation communicationnelle sur les 8 milliards de budget existants, en préférant affecter moins de 10 millions aux médias sur les 300 millions et en les confiant à une agence dont les résultats sont discutables, les responsables de cette opération ont failli. Ils ont sapé les efforts du plus haut sommet de l’Etat pour faire de ce recensement un levier de développement. Il n’est cependant pas tard pour corriger le tir. Il faudra dès à présent associer davantage la presse, et bien évidemment la doter en ressources financières conséquentes et d’informations disponibles et d’éléments de langage.
Il faut aider la presse à aider à la réussite du recensement
Pour réussir donc ce RGPH-5 en terme de communication, il ne suffit pas d’identifier et de recruter après un appel d’offres, nous supposons, une agence de communication qui au finish ne composerait pas avec une marge considérable de médias et d’acteurs communautaires pour le bon déroulement et surtout la réussite de ce cinquième Recensement général des populations et de l’habitation (RGPH-5). Comment comprendre, selon les informations, qu’on veuille engager une particule de médias pour espérer atteindre les objectifs fixés ?
Les médias ont toujours été décisifs dans la réussite de tout projet. Ne pas les associer comme cela se doit, c’est consacrer avant début, l’échec de la campagne même.
S’il est également vrai que les médias doivent accompagner ce processus, il faut une dose d’humilité pour se rendre à l’évidence que ces derniers ne doivent pas être méprisés, mais plutôt conviés et associés dans les règles de l’art. Sinon, ce qui se passe ou ce qui est fait jusqu’alors en matière de communication et implication des médias togolais, laisse sérieusement à désirer. C’est une véritable insulte aux médias togolais toujours méprisés dans les grands projets.
Affirmer que les médias devront accompagner le processus, c’est une évidence. Mais, accompagner comment quand ils ne sont pas considérés?
Le début comateux auquel on assiste pour ce qui est de ce RGPH-5, n’est que la conséquence de cette communication désastreuse.
Il est donc nécessaire et ce de façon urgente de changer de stratégie de communication en y impliquant tous les médias et acteurs communautaires, car il n’est pas trop tard pour mieux faire. Bref, privilégier la communication traditionnelle.
Si le Chef de l’État, Faure Gnassingbé, son Gouvernement et les partenaires techniques et financiers se sont accordés pour la réussite de ce recensement, c’est justement parce que, cela revêt une importance vitale pour le pays. Ils ne méritent pas du tout cette communication déficiente que nous constatons avec probablement des résultats qui ne seront pas à la fin à la hauteur des attentes. Urgence donc de remonter les bretelles à ceux à qui le travail a été confié. Il faut du coup sauver le soldat Communication.
Crédo TETTEH