POLITIQUE : L’IMPORTANCE D’ADAPTER LES CONSTITUTIONS AUX REALITES AFRICAINES

S’il est une question fondamentale qui doit préoccuper le commun des mortels, c’est justement celle concernant l’adéquation des constitutions avec la sociologie africaine, étant donné que moult difficultés sont relevées à ce jour, dans les pays africains, surtout francophones, en ce qui concerne l’exercice du pouvoir politique avec les renversements des Gouvernements ou les coups d’Etats.  Des coups d’Etats chantés et loués par certains esprits dans l’euphorie et parfois dans l’ignorance absolue des valeurs démocratiques.

Pour se donner une contenance, les adeptes ou louangeurs des coups d’Etats ont vite fait, se prévalant d’un certain panafricanisme, de jeter leur dévolu et venin sur des puissances étrangères, à tort ou à raison, comme leur porte-malheur.

Aujourd’hui, il urge, nous semble-t-il très important, de mener la réflexion sur les constitutions africaines et la sociologie des peuples africains. Il nous revient de savoir si les constitutions africaines sont-elles adaptées au contexte africain de nos jours ? Et bien plus, doit-on faire adopter les constitutions africaines en faisant abstractions des réalités africaines qui sont les    nôtres ?

Autant d’interrogations nécessaires auxquelles il faut répondre pour mieux comprendre l’importance de la problématique liée à l’adéquation des constitutions avec la sociologie africaine, dont la signification et le contenu nous paraissent intéressants ici.

En mode observations et réflexions, nous pouvons affirmer sans grand risque de nous éloigner de la vérité que l’Afrique se présente comme un véritable laboratoire dans l’élaboration des constitutions qui sont adoptées, remises en cause, suspendues, abrogées puis renouvelées.

Pour preuve, pendant ces dernières années, et en considérant les coups d’états intervenus au Mali, au Burkina Faso, en Guinée-Conakry, au Niger et au Gabon, la tendance ou la mode des dirigeants actuels dans ces différents pays est justement que les constitutions qui existaient avant leur arrivée au pouvoir ne reflètent pas les réalités desdits pays. Tentant ainsi facilement de justifier les coups d’états et de se poser en bons militaires avides de changer les choses dans ” la bonne direction ” , de ” faire autrement les choses ” en prenant les pouvoirs par la force des armes. Et généralement, l’une des toutes premières décisions des Militaires au pouvoir, que ça soit au Mali, en Guinée-Conakry, au Burkina-Faso, au Niger et au Gabon, est de suspendre immédiatement les constitutions.

Pour faire un peu d’histoire, il est très important de rappeler à la mémoire collective que si les vagues d’indépendances des années soixante ont permis aux pays d’Afrique francophone d’envisager un renouveau de l’idée de constitution, c’est bien plus la période postérieure aux années quatre-vingt-dix, marquée notamment par de nombreuses crises politiques, institutionnelles et sociales liées à l’effondrement du parti unique, qui a vu le déploiement du constitutionnalisme dans lesdits pays.

Et cette période, généralement et abusivement qualifiée de ” transition “, a vu érigée en priorité la définition d’un nouveau modèle politique et constitutionnel caractérisé par plusieurs marqueurs, à savoir l’adoption d’un régime politique de type présidentiel ou semi-présidentiel, l’émergence du pluralisme politique et l’avènement d’élections concurrencées et disputées, la consécration des droits fondamentaux dans les constitutions et l’instauration des Cours constitutionnelles, pensées comme gardiennes de ces droits et garantes de la démocratisation des États.

En posant jadis l’Afrique comme un laboratoire dans l’élaboration des constitutions, il est donc indéniable qu’on parvienne par une dynamique basée sur la sociologie africaine, à adapter fondamentalement, systématiquement et même manifestement les constitutions aux vécus des peuples africains, et surtout que les mandats présidentiels soient réanalysés, en tenant compte d’un certain nombre de critères nécessaires à la paix et à la sécurité publique.

Le Togo en avance

Le Togo a franchi une étape historique avec l’adoption et la promulgation d’une nouvelle constitution promulguée par le Président de la République et publiée sous la Loi N° 2024-005 du 6 mai 2024 dans le Journal Officiel de la République Togolaise, marquant ainsi un tournant important pour le pays.

La Constitution, pour rappel, a un rôle essentiel dans l’organisation d’un État et la définition de son fonctionnement. Ainsi dit, toute Constitution repose sur quelques points clés définissant clairement son rôle. Il s’agit de la fondation de l’identité, de la protection des droits et libertés, de la hiérarchie des normes et de la procédure de révision exigeante.

Cette Constitution, qui a permis aujourd’hui l’avènement du Sénat au Togo, pour la première fois dans l’histoire, dont la session de droit s’est tenue le jeudi 06 mars 2025 au Palais des Congrès de Lomé, tient justement compte des réalités sociologiques qui sont les nôtres.

Avec une période transitoire qui tire à sa fin, il est judicieux de rappeler que d’ici mi-avril 2025 au plus tard, toutes les Institutions prévues par la nouvelle Constitution togolaise seront mises en place, dans l’intérêt du Peuple Togolais.

L’effectivité du Sénat, la durée du mandat des sénateurs, une rationalisation des dépenses publiques

La Constitution du 6 mai 2024 harmonise les mandats des élus et rationnalise ainsi les dépenses d’organisation des élections. Rappelons que sous la Constitution de 1992, le Mandat du Président de la République est de cinq (5) ans, celui des députés et des sénateurs, qui était de cinq (5) ans, est passé à six (6) ans en 2019. Les élus locaux (conseillers municipaux et régionaux) ont un mandat de six (6) ans. Cette situation fait que le Togo organise presque chaque deux ans une élection. Or, non seulement le processus électoral paralyse sur une bonne période le fonctionnement normal de l’État, mais aussi engendre des dépenses importantes.

La Constitution de la Vème République, tirant les leçons de cette situation, a harmonisé le calendrier électoral afin de réduire les dépenses d’organisation des élections. A l’avenir, le Togo n’organisera qu’une seule élection générale chaque six (6) ans pour élire les députés, les conseillers régionaux et municipaux. A l’issue des résultats, les conseillers régionaux et municipaux vont élire deux tiers des sénateurs puis le Président du Conseil nomme le tiers restant. Les sénateurs (élus et nommés) et les députés se réuniront en congrès pour élire le Président de la République, tandis que la majorité au sein de l’Assemblée nationale va se charger de désigner le Président du Conseil. Que d’économie du temps et d’argent avec la Constitution de la Vème République !

Avec donc l’effectivité du Sénat togolais, qui connaitra l’élection de son bureau cette semaine, les     autres Institutions de la République, prévues par la Constitution du 6 Mai 2024, verront jour. Il s’agira du nouveau Président de la République et du Président du Conseil des Ministres. Et c’est justement, ces deux élections qui se feront au plus-tard mi-avril prochain.

Crédo TETTEH

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